Rose-André Charles, Credit-photo: Le Nouvelliste |
Dès l’âge de 14 ans, Rose-André Charles n’avait plus à compter sur personne pour la prendre en charge. Elle devait se débrouiller pour s’occuper d’elle-même. Elle a tenté en vain comme footballeuse, coiffeuse et électricienne. Elle n’a pu trouver sa voie que dans le dépannage de téléphone portable. Depuis 5 ans, elle gagne sa vie « devant la cathédrale » de Port-de-Prince en faisant ce que des centaines d’autres jeunes garçons font pour gagner leur vie. Son histoire…
Assise derrière sa table d’opération très tôt tous les
matins, Rose-André Charles, 24 ans, passe ses journées devant la cathédrale de
Port-au-Prince, où elle gagne sa vie depuis un peu plus de cinq ans. Elle
travaille comme technicienne en réparation de téléphone portable. C’est en 2010
qu’elle a pris goût à ce métier lorsqu’un ami l'a amené au bas de la ville pour
réparer un téléphone qui lui donnait du fil à retordre. Après avoir vu ce que
le réparateur a fait, elle s’est dit que le téléphone n’avait pas grand-chose.
Comme elle avait un ami qui réparait les téléphones dans la zone, elle s’est
adonnée depuis à observer le travail de son ami. « Et voilà, aujourd’hui, je
peux dépanner n’importe quel téléphone portable », a affirmé la jeune femme
entre deux sourires.
Depuis l’âge de 19 ans, Rose-André Charles pratique le
dépannage de téléphone. « Je ne fais rien d’autre pour gagner ma vie et je n’ai
à compter sur personne », a indiqué Rose-André Charles. Grâce à son métier, la
jeune femme paie son loyer annuel, s’habille et se restaure chaque jour. « Je
sais aussi faire de l’économie. J'économise chaque jour 150 gourdes pour le
paiement de mon loyer et d’un autre côté 100 gourdes pour des cas imprévus », a
fait remarquer la dépanneuse de téléphone portable. Très laborieuse, la jeune
femme laisse sa maison dans les premières heures de la journée pour n’y
retourner qu’au soleil couchant.
Avant de devenir dépanneuse de téléphone portable,
Rose-André Charles a tout tenté dans la vie. Comme son père ne prenait pas soin
d’elle, et que sa mère était tombée malade lorsqu’elle avait 14 ans, elle a
décidé de quitter Jérémie où elle a pris naissance pour rentrer à
Port-au-Prince. « Je devais faire face à la réalité de la vie », dit-elle
bassement. Logée chez une tante, elle a tout tenté pour voir si elle pouvait
terminer ses études classiques. Elle a commencé comme coiffeuse dans un barber
shop, puis comme footballeuse. « J’ai intégré le club Amazone; je croyais que
les choses allaient être meilleure mais c’était du mirage », dit-elle,
soulignant que le directeur du club lui avait promis monts et merveilles.
Grâce à une politique du club, elle a intégré l’école
professionnelle des pères salésiens pour apprendre l’électricité. « J’ai bien
commencé », dit-elle souriante, avant de mettre un pli sur son visage pour
indiquer que le club n’a pas payé les frais de scolarité. « J’ai dû abandonner
», a-t-elle regretté, ajoutant que si elle avait la chance de boucler le cycle
de formation, elle aurait un tout autre sort.
Bien que le bas de la ville soit son lieu de travail,
Rose-André Charles n’est pas toujours allègre de s'y retrouver. « Ce n’est pas
un lieu que j’aime, même si c’est là que je gagne ma vie », a-t-elle fait
remarquer. La jeune femme dit souvent subir des actes de discrimination tant de
la part des clients que de la part de ses collègues. Pour Rose-André Charles,
le bas de la ville est comme une jungle. « Si vous vous faites brebis, vous
serez dévoré par des loups », a-t-elle paraphrasé, ajoutant qu’elle a déjà été
victime de vol de matériels.
Cadette d’une famille de 6 enfants, Rose-André Charles a
sa charge, depuis le passage de l’ouragan Matthew, une sœur et son enfant, dont
la maison a été détruite à Jérémie par la catastrophe. Elle dit préférer
travailler dur comme dépanneuse de téléphone portable au bas de la ville au
lieu de vendre sa chair pour répondre à ses besoins.
Crédit: Carlin Michel/LN
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