Claude Dambreville |
Je présume que beaucoup de gens ont gardé un délicieux
souvenir du Parc D'enfants. Quand on évoque ce site inoubliable d’autrefois, ce
sont des couleurs fraîches et vives que l'on revoit tout d'abord : du bleu, du
rouge, du jaune, et du vert.
Toutes les attractions de ce modeste parc étaient fabriquées
en bois, et impeccablement peintes : la Grande Roue ( à la vérité, pas
tellement grande), des petits sièges tournants ou volants, des glissoires sublimes,
un gentil carrousel ou manège, etc.
Pour mes jeunes lecteurs, j'aurais voulu situer cet agréable
"Parc D'enfants", mais cela n'est pas facile, compte tenu de la
disparition d'un important point de repère, soit les vertes Tribunes du Champ
de Mars. Pour simplifier, disons que ce sympathique lieu de rendez-vous
dominical des enfants de toutes les conditions, avoisinait le Rex-Théâtre, et
le Musée d'Art du Collège St Pierre, cet établissement ayant été érigé
longtemps après le démantèlement du parc en question.
N'ayant jamais connu d'autres terrains de divertissements
plus sophistiqués que leur familier Parc d'Enfants, les garçonnets et fillettes
éprouvaient un bonheur inouï à se faire accompagner chaque dimanche à ce
charmant endroit au coloris si joyeux.
L'attraction préférée des enfants de cette époque était
indubitablement la Grande Roue. Quand toutes les places de ce plaisant appareil
artisanal étaient finalement occupées par toute une marmaille impatiente,
tumultueuse, et heureuse, le décollage pouvait s'effectuer. Une mise en
mouvement qui ne nécessitait aucune aide motorisée. Les bras musclés et
puissants d'un haltérophile de service imprimaient aisément un mouvement
rotatoire à l'original véhicule circulaire. Et, après cinquante tours bien comptés,
ponctués de frais et perçants braillements angéliques, la roue s’immobilisait,
et les petits passagers mettaient pied à terre, ivres de tournoiement et de
plaisir.
Et ce fut ainsi que, de dimanche en dimanche, le Parc
D'enfants procura des heures merveilleuses et pleines d'allégresse à la
population enfantine de Port-au-Prince. Malheureusement, le bonheur est trop
souvent éphémère. Au fil des mois, impitoyablement et inexorablement, des
pluies abondantes et persistantes avaient fini par pourrir et ronger les
appareils en bois de ce petit paradis, qui cessa desormais de fonctionner, pour
graves causes d'insécurité. Et, ( pour reprendre une tournure de Guy de
Maupassant ) , ce fut alors dans le coeur des enfants de Port-au-Prince, comme
une pluie de chagrin, et une inondation de désespoir.
Crédit : Claude
Dambreville
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