Claude Dambreville |
Tout récemment, mes pensées vagabondes m'ont restitué avec
fidélité l'image de ces hommes pleins d'énergie qui, porteurs d'un grand panier
sur la tête, arpentaient les rues de Port-au-Prince, en criant sur un ton
monocorde et parfois traînant :
" Yerrrr... Machte mamit, papye, boutey".
En somme, à quoi équivalait cette activité ? A débarrasser
certains foyers d'un important lot de fatras ménagers soigneusement empilés :
des revues et journaux anciens ou de date récente, des contenants en fer-blanc,
des bouteilles de toutes sortes, etc. Mais, paradoxalement, au lieu de verser
un certain montant à celui qui vous aidait à assainir votre intérieur, et à y
mettre un peu d'ordre, c'était plutôt le providentiel nettoyeur qui vous
manifestait sa reconnaissance, en vous allongeant une modique rémunération qui,
pourtant, vous arrachait un franc sourire de contentement.
Il paraît même, autant qu'il m'en souvienne, que les deux
parties éprouvaient mutuellement une satisfaction égale, car, aussitôt qu'il
regagnait la rue, l'homme au grand panier marchait avec beaucoup plus
d'entrain, et un regain d'enthousiasme perçait dans son annonce répétitive :
"Yerrrr...Machte mamit, papye, boutey".
Et, quand, en fin de compte, le grand panier était plein à
ras bord, il fallait penser à la remise à neuf des acquisitions de la journée.
A la sortie du Corridor Bois-de-Chêne, serpentait en permanence un faible
courant d'eau douteuse. Cet opportun liquide servait au rinçage des contenants
en fer-blanc et des bouteilles. Quant à la paperasse, elle était en bon état,
et pouvait être détaillée sans crainte, en présence des acheteurs.
Et voilà. La marchandise étant récurée et classée, il n'y
avait plus qu'à se diriger vers le Marché Salomon, ou le Marché
"En-bas", pour la mise en train des opérations de revente.
Crédit : Claude Dambreville
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