Photo (illustration)
: Les Cacos Noirs
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D’entrée de jeu, nous précisons qu’il existe plusieurs
Rabòday : le Rabòday traditionnel avec les rythmes issus du vaudou, le Rabòday
réadapté par les groupes Vwadèzil en 2004 (M pa nan pale fransè), Barikad Crew
« Ban m tout afè m » et le Rabòday remasterisé (mixtapes d’après 2010).
Le premier tire ses
origines dans les rythmes de la musique « Rasin » (vaudou). Le second a gardé
un peu de lien avec les rythmes d’origine tout en le modernisant avec des
rythmes plus actuels ou des fois plus anciens. On pouvait encore écouter
celui-là. Mais le « Rabòday remasterisé se détache presque complètement du «
Rabòday » originaire non seulement du rythme, mais aussi des textes. Ce n’est
du « Rabòday » que de nom. Il peut mélanger toutes les tendances de musique en
passant de la variété au rap, de la pop au rock, de la « rasin » au boléro,
etc. Mais dans le Rabòday d’après le tremblement de terre de 2010, c’est
surtout le son électro qui domine.
Le « Rabòday » remastérisé, nous semble-t-il, est né dans le
contexte d’après le tremblement de terre de 2010 (avec le hit music Anba
dekonb), un moment où l’économie du pays s’est effondrée, où les valeurs
sociétales ont atteint un haut degré d’obsolescence, où l’éducation, plus
précisément l’instruction est devenue plus qu’une marchandise. Dans cette
situation de dénuement quasi total, l’indigence a pris le dessus pour favoriser
l’émergence d’une certaine musique inculte, indigente, assourdissante,
avilissante, discordante offerte aux jeunes gens pour les abêtir.
Dans cette musique d’une trivialité exacerbée, la promotion
de nouvelles moeurs qui incitent à la dépravation est clairement présente:
alcool, cigarettes et surabondance de sexe. Nous y assistons au triomphe du
machisme et de tout ce qui y est associé. C’est une musique contre la femme,
nos mères, nos soeurs, nos tantes, nos cousines et nos filles. Cette musique
dépourvue de romantisme et de sentimentalisme prend la femme pour objet, objet
de sexe et de frime. On se demande où sont nos vieux chansonniers et nos paroliers
d’hier? Nous pouvons citer : Gérard Dupervil, Joël Théodore, Ansy Dérose. Eux
qui exaltaient la beauté, le courage et les valeurs de nos femmes. Eux qui
faisaient rêver. Maintenant, on ne rêve plus ‘se ban m tout afè m’. Et quand on
perd cette capacité, on n’apprécie plus la femme, on n’apprécie plus la vie.
Faut-il que nous descendions encore plus bas que l’abîme si cela existe ?
De Timamoun, en
passant par Fè Wana mache à Ay Ti Bagay et Bòdègèt, la femme est
surreprésentée, le sexe est omniprésent. Les paroles sont d’une indigence
totale. Dans Timamoun : « Yo fè lanmou tounen biznis », « Mennaj tounen paran
», « Y ale kay gangan, yo met zonbi nan dan… pou yo fouye blòdè », « Dj yo
Timamoun, chofè taksi yo Timamoun », « Depi w fè l a youn fò w fè l a de ».
Dans Fè
Wana mache : « Men ki jan, men ki jan. Fè Wana mache » , « Fè Wana mache, fè
Wana vòltije », « Manmzèl fin bwè ragamann ou, fè l mache », « Li fin manje pen
a manba w, fè l mache », « Manmzèl fin bwè ji Alaska w, fè l mache », « Lè
blòdè kase madanm ou pinga w panike… Al lakay blòdè a kase sè blòdè a, kase
matant blòdè a, kase kouzin blòdè a, bale wouze kay blòdè a ».
Dans Ay Ti bagay : « Si Limena ta ban n poto sa n ap ? … Fè
l pase de laponyèt a laponyèt » , « Fè dousè w. Chak moun fè dousè w », « Yo di
w fè l tou. Machanm chabon pa niche dwèt’. Dans Bòdègèt : « Chawa pete », «
plede fè l a men, plede fè l a pye », « Ban m on lòt bòt », « Kay gwo manman
Majori mande pou mwen Medjina mande pou mwen », « Yo pral di se dyab ».
Des rimes travaillées, structure, rythmique impeccable, de
la cadence, des figures de style utilisées avec intelligence, bref, une
écriture recherchée, de la grande poésie ! Du Georges Castera ! Oh pardon ! De
la grande bêtise ! Voilà ce qu’on offre à nos jeunes gens.
Les tap-tap et les bus de transport en commun nous servent
en abondance ce genre de musique. Les écoles qui organisent les festivités lors
de moments comme les fêtes de fin d’année font appel aux DJ qui ne jurent que
par cette musique indécente. Vendredi dernier, je me trouvais devant une école
où j’achetais des bonbons, à l’intérieur jouait un DJ. La musique qu’il
diffusait était d’une obscénité déconcertante : « (…) chita sou Z*Z*’.
Brusquement mon coeur se mettait à palpiter très fortement, car je ne m’attendais
pas à cela. Je me suis posé cette question légitime, bien sûr, et les enfants
qui écoutent cette musique, comment doivent-ils se sentir ? Ce genre de musique
obscène et indélicate constitue le fonds de commerce de certaines personnes.
Mais, qui osera dénoncer cette pratique. Qui osera y toucher ? Les chauffeurs
imposent cette musique immonde et délinquante aux passagers qui n’ont pas le
courage de leur demander d’arrêter le son sous prétexte que c’est une musique à
la mode, une musique branchée.
Face à ces dérives,
une demande de réglementation se fait sentir de nos dirigeants pour empêcher
notre jeunesse d’être irriguée par ces flots de bêtises immondes et ignobles.
Cette promotion du « Rabòtay » témoigne d’une déchéance sociale, d’une
décadence des bonnes moeurs, du triomphe de la médiocrité et du paroxysme de
l’inculture.
Il n’y a presque plus
de pudeur chez la plupart de nos jeunes qui sont exposés à cette ineptie. La
pudeur est devenue vieux jeu. Ils ou elles déhanchent n’importe quand, n’importe
où et n’importe comment en étalant leurs bras en avant, recourbant leur dos en
avant donnant leur postérieur à tous ceux qui veulent… Quelle indécence !
J’espère que cette folie sera de courte durée.
Vous me parlez de liberté ! Oh que oui ! Les gens ont le
droit de penser et choisir comme cela leur chante. J’en suis tout à fait
convaincu. Je suis même certain et sans l’ombre d’un doute que l’on peut
aujourd’hui encore, et ceci sans hésiter, faire l’apologie du nazisme, du
fascisme, de l’apartheid et de l’esclavagisme dans notre société.
Allez-y ! Aucune
censure.
Crédit; Ethson OTILIEN
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