samedi 27 février 2016

Érick Charles, de l'enfer au paradis

Érick Charles est mort. Un accident vasculaire cérébral (AVC) a eu raison du chanteur vedette de Mizik Mizik ce matin à 9 h 45. Les médecins de l’Hôpital Bernard Mevs l’avaient débranché à 9 h 24 parce que sa mort clinique était déjà constatée. L’interprète de « Ban m fènwa mwen » est parti seul, tranquillement, environ vingt minutes plus tard.

 Les rumeurs, avant la confirmation de Jean Robert Charles, frère aîné d’Érick Charles, avaient enflammé la toile dès 6 h du matin. À ce moment-là, l’artiste était encore en vie. 
Agonisant, luttant contre la grande faucheuse, mais en vie. Les internautes, comme certains médias, étaient probablement plus intéressés à annoncer sa mort qu’un quelconque rétablissement, ce qui n’aurait fait aucun « buzz ». Déjà en 2013, de fausses rumeurs avaient circulé sur une probable mort de l’artiste après sa crise d’hypoglycémie. Curiosité morbide, quand tu nous tiens... 

Érick Charles avait la santé fragile depuis 2013, quand il a été hospitalisé à la suite d’une crise d’hypoglycémie causée par des complications liées à une cardiomyopathie virale. L’assassinat récent d’un autre frère de l’artiste l’avait davantage fragilisé. 

La douleur des musiciens de Mizik Mizik est incontestablement immense. La mort vient en effet de frapper aux portes d’une amitié et d’une collaboration qui ont duré plus de vingt ans. C’est un frère qui est parti. Sans crier gare. 

« Chères amies, chers amis, « L’Éternel a donné, et l’Éternel a ôté; que le nom de l’Éternel soit béni ! » Nous souffrons terriblement de la perte ce matin de notre frère Érick Charles. Un vide impossible à combler dans nos vies. Que la terre lui soit légère, Que Dieu lui réserve une place de choix à sa table. Nous sommes très touchés par toutes vos marques d'affection. Merci. » Tels sont les premiers mots de Fabrice Rouzier, maestro de Mizik Mizik, pour dire adieu à son lead vocal et ami. 

Belo, aujourd’hui une grande voix de la musique francophone, doit beaucoup à Érick Charles et à la bande à Rouzier à ses débuts. S’il a, depuis, volé de ses propres ailes, l'artiste est reconnaissant de tout ce que cette collaboration, tout particulièrement Éric Charles, lui a apporté. Il ne rate jamais une occasion de le rappeler, aujourd’hui plus encore. Au micro d’une journaliste de Radio Quisqueya, le chanteur a expliqué qu’il avait énormément de peine. Les mots qu’il lui a dédiés sur son mur Facebook: « Erick Charles Frè'm, Nen pran kou, Je kouri dlo. Map sonjew pou lontan ankò. Ke bondye resevwa'w nan wayòm li. # BelO ». Keke Bélizaire, pour sa part, est encore trop affecté pour faire de déclarations à la presse, a expliqué Liliane Pierre-Paul au journal de 4 h.

 L’aventure Érick Charles-Mizik Mizik a commencé dans les années 90. Il remplaçait à l’époque Emmanuel Obas, lead vocal, qui quittait le pays. Son passage à Siwo de Miragoâne puis à Dipi Express allait révéler le talent du chateur d’Ayizan, avant que celui-ci ne rejoigne le duo Keke-Fabrice. Les trois, avec les autres musiciens, n'allaient plus se lâcher. La génération des trentenaires et quarantenaires d’aujourd’hui se souvient sans nul doute des albums Paradi nan lanfè, Blakawout qui avait enflammé les ninety’s. 

Avec Érick, Mizik Mizik allait d’ailleurs être le seul véritable concurrent de Sweet Micky, autre groupe compas phare d'alors. La polémique entre les deux leaders allait finir par baisser considérablement au fil des ans, notamment durant le mandat de Michel Martelly, maestro et chanteur de Sweet Micky. L’ex-président haïtien a d’ailleurs fait une publication sur son mur Facebook en signe de sympathie : « Je salue le départ pour l'au-delà de mon frère musicien Éric Charles. Mes sympathies à la famille et au secteur de la musique haïtienne particulièrement au groupe MizikMizik. #MizisyenSeYonSèlKodFanmi». 

Le 13 févier dernier, Érick Charles était sur scène avec le groupe. C’était la veille de la Saint-Valentin, lors d’un concert pour les amoureux avec le duo Orlane- Éric Virgal. Il n’avait sûrement pas prévu de mourir moins de quinze jours plus tard. Pourtant, sans le savoir, il a fait ses adieux au public qu’il a tant chéri toutes ses années, et qui le lui a toujours bien rendu. Ce fut là son ultime marque d’amour.


CréditPéguy F. C. Pierre



Aucun commentaire: