dimanche 25 juin 2017
Anecdote du Palais National après le départ de jean Claude Duvalier et Michèle Bennett
Le Père Jean Bertrand Aristide et son petit lit en fer.
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Le Président Jean Bertrand Aristide et notre lit king size.
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Après les cérémonies d'usage de l'investiture de la première présidence du Père Aristide, le Chef du Protocole, accompagné de l'Intendant, invita le Président fraîchement élu à visiter les Appartements Privés du Palais National.
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Cet appartement a été construit après mon mariage avec Jean Claude Duvalier. On y a emménagé en 1982 jusqu'au 7 Février 1986, date de notre départ vers la France.
D'une superficie de près de mille cinq cent mètres carrés, l'appartement climatisé était très agréable à vivre et surtout très fonctionnel. On avait l'impression de vivre dans une grande maison. Avec trois chambres et trois salles de bain, grands dressings pour Madame et Monsieur et boudoir de Madame. De notre chambre en duplex, on descendait un joli escalier qui nous menait à un salon-bureau-bibliothèque que je partageais avec Jean Claude les soirs qu'on ramenait nos dossiers urgents et seuls nos intimes y avaient accès. Une porte nous donnait accès à la petite office-cuisine située en face de la salle de séjour et de la salle à manger familiale où nous prenions tous nos repas. L'office-cuisine était équipée d'un monte-plats, ce qui facilitait les grandes cuisines situées au rez-de-chaussée du Palais où tous nos mets étaient préparés.
Un grand salon jouxtait la salle à manger qui donnait sur une serre-séjour avec vue sur le Musée du Panthéon National. À côté du salon, j'avais aménagé une salle de musique-cinéma laquelle communiquait avec l'infirmerie qui comprenait deux pièces dont
la chambre avec sa salle de bain, équipée comme une chambre d'hôpital avec un lit, des fauteuils. La pièce attenante servait de salle de consultation avec tout ce qui fallait pour procéder aux examens pédiatriques, gynécologiques ou autres, ce qui facilitait les visites médicales des médecins de la famille et nous évitait d'aller à leurs cliniques pour plus de confidentialité.
À côté de la clinique, se trouvait le salon de beauté et de coiffure équipé professionnellement pour recevoir coiffeurs, visagiste, pédicure et manucure.
Notre maison était joliment décorée par notre cher ami, le grand décorateur Johnny Sambour, qui avait un goût exquis. Les meubles contemporains et équipements sur mesure étaient fabriqués en Italie. Le tout mélangé à de jolies pièces d'antiquités pour la touche française.
Arrivé au Bureau de l'Officier du Jour situé juste à l'entrée de nos appartements, le Président Aristide commença la visite guidée par le vestibule et en entrant dans le grand salon, Il tint à féliciter l'Intendant pour la décoration. Il s'attarda longuement devant un beau portrait du Dr François Duvalier réalisé par un grand peintre portraitiste anglais. Ce tableau était suspendu au dessus d'une jolie console en bois doré datant du 18ème siècle. Son comportement a étonné plus d'un car il donnait davantage l'impression de se recueillir pieusement devant le portrait de mon beau-père. Passé ce moment d'émotions, Il continua les mains croisées dans le dos la visite vers les autres pièces et se fit conduire vers la chambre principale en passant par l'escalier du salon-bureau-bibliothèque. Il secouait la tête toujours avec un petit sourire après chaque pièce, ce que l'Intendant du Palais prenait pour une approbation de la décoration des lieux. Visiblement le petit prêtre devenu Président aimait ce qu'il voyait.
Tout se passait bien pour le grand bonheur de l'Intendant jusqu'à leur arrivée dans la chambre! Aristide s'arrêta net devant notre lit de taille king size, Il plaça son bras gauche à sa taille tout en s'y appuyant avec le coude du bras droit en posant son index sur le nez. Il prit un long moment de réflexion et interpella le Chef du Protocole et l'Intendant d'une voix presque douce mais autoritaire en disant: "Messieurs! Je suis le petit prêtre des pauvres des bidonvilles et Il est hors de question que je dorme dans ce grand lit!". Décontenancés, ces Messieurs lui dirent qu'ils feraient le nécessaire immédiatement pour remplacer le lit par un autre de taille normale.
Ce à quoi le Président Aristide répondît sèchement: "Envoyez tout de suite quelqu'un chez moi prendre mon petit lit en fer et faites le remplacement."
"A vos ordres Monsieur le Président!" répondirent en cœur le Chef du Protocole et l'Intendant.
À son retour à Haïti, lors de sa deuxième Présidence, l'Intendant fit remonter le petit lit en fer du Président Aristide des dépôts du Palais National et le remit dans la chambre principale des appartements privés du Palais National.
Après les cérémonies d'usage de sa deuxième investiture, Il fut conduit encore une fois pour la visite guidée des appartements privés qui se fit plus rapidement. Entre temps, le tableau représentant le Dr François Duvalier avait disparu du grand salon.
Arrivé près du lit dans la chambre principale, Il s'exclama, l'air dégoûté, en pointant de son doigt son petit lit en fer: "Qu'est-ce-que c'est que ça?".
D'une voix tremblante, l'Intendant du Palais lui répondit: "Monsieur le Président, je vous avais gardé votre petit lit en fer dans les dépôts du Palais."
Et le Président Aristide de répondre en tournant le dos à ces Messieurs tout en prenant la direction des escaliers: "Débarrassez moi la chambre de ce petit lit et remplacez le immédiatement par le lit king size de Jean Claude Duvalier!".
"À vos ordres Monsieur le Président." répondit l'Intendant.
Zombi goûté sel.
PS. Cette histoire que j'ai voulu partager avec vous aujourd'hui, m'a été racontée par l'Intendant du Palais, lors de mon premier voyage à Haïti quatre jours après le tremblement de terre en Janvier 2010.
Crédit: Michèle Bennett Duvalier
Paris, France
Le 24 Juin 2017
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