mercredi 31 mai 2017

Haiti/Littérature: Louis-Philippe Dalembert, lauréat 2017 du Prix France Bleu


Louis Philippe Dalembert


Pour son roman Avant que les ombres s’effacent publié chez Sabine Wespieser, Louis Philippe Dalembert est lauréat 2017 du Prix France Bleu. Ce Prix récompense, en effet, le meilleur roman francophone de l’été parmi une sélection faite par le réseau des librairies indépendantes. Cette année, le jury présidé par Éric Revel, directeur du réseau France Bleu, a récompensé cette grande figure de nos lettres. Le jury était composé de Gaelle Josse (lauréate 2016), d’une librairie indépendante de Limoges, d’une lectrice de la revue Page et d’une auditrice de France Bleu.


Selon ce Jury, la prestigieuse récompense littéraire a été attribuée dans les règles de l’art. Écrivain, Louis Philippe Dalembert a la structure de son roman. Il se sert de ses outils et ne rechigne pas à s’y attacher. Le livre est constitué d’actions s’organisant en intrigues qui, elles-mêmes, se composent en séquences, c’est-à-dire des passages formant une unité sur le plan du temps, des lieux, de l’action et des personnages. Le schéma narratif, plutôt simple, prend en compte la succession logique des évènements. L’enchâssement permet de développer des intrigues secondaires à l’intérieur de l’intrigue principale. « Je suis très contente, d’autant plus que c’est mon ancien étudiant à l’École normale supérieure (ENS) qui est devenu un excellent ami et qui publie à la même édition que moi », s’est réjouie la romancière Yanick Lahens jointe au téléphone. Elle estime que ça fait longtemps que l’auteur de Le crayon du Bon Dieu n’a pas de gomme avait droit à cette grande distinction.


La synopsis du roman tourne autour d’une fresque conduisant son protagoniste de Lodz en Pologne, à Port-au-Prince. Dalembert rappelle ainsi le vote par l’État haïtien en 1939 d’un décret-loi de naturalisation in absentia qui a autorisé ses consulats à délivrer passeports et sauf-conduits à des centaines de Juifs, leur permettant d’échapper au nazisme. Avant d’arriver à Port-au-Prince à la faveur de ce décret, au début de l’automne 1939, le docteur Ruben Schwarzberg, né en 1913 dans une famille juive polonaise a traversé bien des épreuves. Devenu un médecin réputé et le patriarche de trois générations d’Haïtiens, il a peu à peu tiré au trait sur son passé. Mais quand Haïti est frappée par le séisme dévastateur de janvier 2010 et que la petite fille de sa défunte tante Ruth, partie s’installer en Palestine avant la Deuxième Guerre mondiale, accourt parmi les médecins et les secouristes du monde entier, il accepte de revenir pour elle sur son histoire familiale.


 Né à Port-au-Prince le 8 décembre 1962, Louis Philippe Dalembert a grandi au Bel-Air, un quartier populaire de la capitale. De formation littéraire et journalistique, il a travaillé comme journaliste avant de partir en France en 1986 poursuivre ses études qu’il a achevées à l’Université Paris-III-Sorbonne Nouvelle par un doctorat en littérature comparée avec une thèse sur l’écrivain cubain Alejo Carpentier. Il a vécu tour à tour à Nancy, Paris, Rome, Jérusalem, Berlin, Milwaukee. Voyageur infatigable, il va partout où ses pas et son coeur le portent dans l’écho renouvelé de sa terre natale. Il vit aujourd’hui entre Paris, Port-au-Prince et l’Italie.


Louis Philippe Dalembert n’arrive pas les mains vides à France Bleu. Il y débarque même les bras chargés. Son origine, son parcours, son accent, ses convictions, ses doutes , ses inquiétudes et plus que tout peut-être ses rêves d’harmonie et de coexistence pacifique entre les peuples lui ont permis d’être le lauréat du Grand Prix de Poésie de la ville d’Angers (1987), du Prix RFO du Livre pour le roman L’Autre face de la mer (Paris, 1999), du Prix Casa de Las Americas pour le roman Les dieux voyagent la nuit (Cuba, 2008) . Sans oublier le Prix Thyde Monnier de La Société des gens de Lettres pour le roman Ballade d’un amour inachevé (Paris, 2013).


Par ces temps de crises, de grèves, de revendications sociales et d’incertitudes sur l’avenir, Louis Philippe Dalembert fait à son pays natal un honneur aussi grand qu’inattendu. Il a fait vibrer la fibre nationale désemparée grâce à ses travaux littéraires d’envergure, à un moment où la société haïtienne était en passe d’oublier qu’elle avait encore sa littérature, la seule chose qui lui reste après avoir tout perdu. Ou presque.


Crédit:  Robenson Bernard

mercredi 24 mai 2017

Haiti/USA/Université: Une étudiante américaine publie sa thèse en créole haïtien



Lydia Bradford est devenue la première étudiante de « Duke University » à rédiger une thèse de premier cycle en créole.

Lydia Bradford est originaire d'Oklahoma City. Avant d’intégrer Duke University, elle rêvait de se frotter aux problèmes de santé mondiale. Jusqu’à ce qu’elle découvre le créole. Ou précisément, les cours de créole qu’offre cette prestigieuse université américaine. Depuis, elle s’est entichée de cette langue, l’a étudié et effectué deux visites en Haïti. Depuis peu, elle est devenue la première étudiante de « Duke University » à rédiger une thèse de premier cycle entièrement en créole.

Elle a été interviewée par son Université. La transcription de son témoignage ci-dessous.

Le programme créole à Duke est encore assez jeune. Qu'est-ce qui vous a amené dans cette direction, et à quoi ressemble votre expérience?

Pour jeter mon dévolu sur le créole haïtien, le département m'a dit que je devais écrire une thèse pour démontrer ma compétence. Mais bien avant, j'ai effectivement supposé que ma thèse devait être écrite en créole haïtien, donc dès le début, j'avais déjà prévu de l'écrire en créole. En plus de cela, dans l'ensemble du programme créole haïtien, notre professeur Jacques Pierre nous a toujours encouragés à comprendre l'importance de lutter pour la langue dans la langue elle-même. Ce programme créole haïtien à Duke est génial et très encourageant. Jacques Pierre enseigne à tous les niveaux et la façon dont il intègre la langue, l'histoire et la culture dans les classes était excellente. J'ai beaucoup appris et, en mon deuxième semestre de créole, je parlais parfaitement créole. Je n'ai jamais eu peur de parler en classe, et cela a aidé mon créole énormément.

Existe-t-il une communauté de langue créole ici (à Duke University) assez grande pour que vous puissiez affiner et maintenir vos compétences linguistiques? Qu'en est-il de votre diplôme ? Quels sont vos plans ?

Il y a une petite communauté de langue créole à Durham dont j’ai fait la connaissance pendant mon passage à Duke. Cependant, la plus grande aide pour perfectionner mes compétences linguistiques était mon amie Tanya Thomas, étudiante haïtienne et américaine à Duke. Elle me parlait en créole et corrigeait toutes mes erreurs. Cela a toujours été d'une grande aide.

En plus de Tanya et de la petite communauté haïtienne, j'ai fait des amis en Haïti avec qui je reste en contact et je pratique mon créole sur Messenger ou Skype. En ce moment, j’enseigne avec Teach for America à Tulsa, Okla., depuis deux ans. Je ne sais pas si je pourrais trouver un moyen de continuer à perfectionner mes compétences en créole haïtien, mais j'espère que d’autres occasions se présenteront.

Qu'est-ce qui a attiré votre intérêt en Haïti?

Je me suis intéressée à Haïti dès le lycée en raison de la beauté du pays. C'est une île si belle dans les Caraïbes. Comme je continuais à explorer Haïti dans la salle de classe, je commençais à parler la langue et à visiter le pays, j’apprenais davantage sur la culture, l'histoire et les gens. La culture, l'histoire et la langue de ce pays sont riches et pleines de beauté.


lundi 15 mai 2017

Haïti/Carburant: Hausse de 18% du prix de l'essence.



Le gouvernement haïtien a annoncé ce dimanche 14 mai une importante hausse des tarifs des carburants malgré l'impopularité de la mesure auprès de la majorité précaire des habitants, très sensible à toute inflation, une mesure destinée à contribuer à remettre les finances publiques à flot. Les ministères de l'Economie, des Finances, du Commerce et de l'Industrie ont décidé, après plus d'une semaine de négociations avec les syndicats de transporteurs, d'augmenter le prix du kérosène de 17% celui de l'essence de 18,5% et celui du diesel de 20%.

Dès l'annonce de cette mesure, qui doit prendre effet lundi, plusieurs stations essence de la capitale Port-au-Prince ont été prises d'assaut par des automobilistes espérant remplir une dernière fois le réservoir de leur véhicule en bénéficiant des anciens tarifs.

Haïti n'exporte que pour un milliard de dollars de marchandises par an alors que le coût de ses importations dépasse les trois milliards de dollars. Avec une balance commerciale si déficitaire et des rentrées fiscales insuffisantes, l'Etat haïtien est aujourd'hui même dans l'incapacité de rembourser les intérêts de sa dette au Venezuela. Haïti bénéficie depuis 12 ans du programme Petrocaribe, initié par l'ancien président vénézuélien Hugo Chavez, qui permet à plusieurs pays d'Amérique latine et des Caraïbes d'acquérir des produits pétroliers à un coût avantageux et de payer leurs factures sur 25 ans à un taux d'intérêt de 1%.

Depuis 2008, Haïti a ainsi pu bénéficier de plus de 2 milliards de dollars de prêts mais n'a pas, contrairement à la vision chaviste à l'origine du programme, investi cette somme dans des politiques à même de développer l'économie du pays et permettre le remboursement de cette dette. Les précédentes administrations n'ont pas fait évoluer le prix des carburants en fonction du prix du marché mondial car, comme Haïti importe massivement ses produits de consommation quotidienne, toute hausse des tarifs des carburants entraîne une hausse générale des prix et donc le mécontentement de la population.

En août dernier, le gouvernement du président provisoire Jocelerme Privert avait acté une augmentation des prix des produits pétroliers mais, en raison de manifestations dans la capitale et suite à une résolution du Sénat contre cette mesure, les tarifs avaient été révisés à la baisse après seulement quelques jours.

Crédit: DIASPORAMA-HAITI avec CANAL+HAITI et AFP